La mort à haute vitesse

Depuis quelques décennies, les rites funéraires sont de plus en plus rapides. La pandémie de coronavirus accélère un phénomène déjà bien présent dans notre société et redéfinit notre rapport aux rites funéraires. Comme partout ailleurs dans le monde, on cherche à saluer dignement nos proches, malgré toutes les limites imposées par la situation.

La mort à haute vitesse n’est pas sans impact: des deuils mal vécus, qui traînent dans le cœur et la tête, résonnent longtemps dans les bureaux de psychologues.

« Comment rendre hommage? Comment faire un rituel? On pouvait pas faire, comme on ne pouvait faire traditionnellement. »

François veut souligner la mort de son frère, le comédien Ghyslain Tremblay. Ça faisait un bout de temps qu’on n’entendait plus parler de son grand frère. Il s’était éclipsé des scènes, du petit et du grand écran, en même temps que sa mémoire. Depuis une décennie, la maladie prenait lentement le contrôle de son corps, de sa tête et de ses souvenirs.

Dans ce documentaire, nous cherchons à mesurer les impacts de l’accélération des rites funéraires dans notre société, mais aussi à montrer leur pertinence. La façon dont nous soulignons la mort de nos proches a beaucoup changé au cours du dernier siècle. D’un événement vécu pendant une longue période à la maison, le rituel funéraire s’est déplacé dans les salons funéraires et est souvent mené dans un délai très court. De plus, en nous éloignant de la religion catholique, nous n’avons pas réellement remplacé tous ceux qui étaient responsables de mener cette importante étape dans le processus du deuil. Alors, qui s’en occupe maintenant? Ce n’est pas clair.

François va donc à la rencontre d’un historien, d’une directrice d’une résidence funéraire et d’une professeure spécialisée sur le sujet, afin d’y voir plus clair dans son propre deuil.

Jérôme Gagnon, historien :
« Il est beaucoup question de réinventer le rituel, dans un monde post-chrétien, de réinventer quelque chose de significatif. »

Brigitte Deschênes, thanatologue et directrice de la Résidence funéraire du Saguenay :
« Toute notre vie, on tisse des liens, on en coupe, on en perd… Mieux on quitte une relation, mieux on se porte. »

Nicole Bouchard, Ph. D.Professeure au département des sciences humaines et sociales, UQAC :
« Quand on fait une cérémonie funéraire, on se fait du bien à soi. […] Tous les gens qui ont été frappés par la Covid, il faut qu’il se passe quelque chose. Ce n’est pas obligé d’être étendu; ça peut être dans l’intimité de sa chambre, ça peut être avec des amis, sur le bord du Saguenay, ça peut être partout! Mais, il faut marquer ce temps-là. »